Le terme soignant provient du latin « soniare » qui signifie « s’occuper de ».

D’après le dictionnaire Larousse, le soignant désigne une « personne qui donne des soins à quelqu’un »[1].

Une définition plus précise est donnée par le dictionnaire des soins infirmiers, il s’agit d’un « professionnel de santé qui dispense des soins en fonction du diplôme qui l’y habilite »[2].

Le terme soignant désigne donc une multitude de professionnels.

L’infirmier en fait partie, d’après l’article R.4311-1 du Code de la Santé Public (CSP), « L’exercice de la profession d’infirmier ou d’infirmière comporte l’analyse, l’organisation, la réalisation de soins infirmiers et leur évaluation »[3], soins infirmiers qui « intègrent qualité technique et qualité des relations avec le malade » d’après l’article R.4311-2 du CSP.

Cet article montre bien qu’un infirmier ou infirmière doit avoir une écoute et une aptitude relationnelle importante envers les patients.

Les émotions des soignants

Certains auteurs remarquent que la notion d’émotion ne s’accorde pas toujours avec le métier de soignants notamment vis-à-vis de la population générale.

En effet, selon Claude CURCHOD, le « mythe du soignant vertueux (est d’être) empathique, toujours à l’écoute, disponible, non jugeant, empli de compassion, expert en communication »[5].

Et d’après Catherine MERCADIER, « les soignants se doivent de maîtriser leurs affects »[6]. En effet, dans l’historique du métier de soignant, l’infirmière ne se devait d’éprouver des émotions face au patient, elle devait respecter une neutralité émotionnelle, afin de ne pas s’attacher au patient.

Mais, selon Claude CURCHOD, cela tant à évoluer vers une reconnaissance des émotions des soignants, considérés comme « étant une composante naturelle et inséparable de l’activité soignante»[7].

Selon Dominique RISPAIL, « l’étudiant infirmier ou le professionnel, par la richesse des situations qu’il rencontre, va connaître au cours de ces stages ou de ses différentes affectations, une variété étonnante d’émotions inédites, de forte intensité et à des intervalles souvent rapprochés »[8].

Les émotions sont en lien direct avec les situations de soins auxquelles nous sommes confrontées :

  • La colère peut être générée par l’apparition d’un évènement indésirable et inattendu.
  • La joie peut être ressentie lors de la guérison, d’un rétablissement d’un patient ou lors d’une reconnaissance de son travail.
  • La peur est une émotion liée au danger, elle peut survenir lorsqu’un patient devient agressif voir incontrôlable.
  • La tristesse peut-être liée au décès d’un patient.

Les émotions des soignants peuvent, également, être en lien avec des composantes institutionnelles, organisationnelles ou liées au travail en équipe. Ces composantes ne seront pas développées dans ce travail.

Le stress des soignants

La notion de stress est évoquée dans les années 30, par Hans SELYE, un endocrinologue, par l’expression « syndrome généralisé d’adaptation ». Il n’utilisera le mot « stress » que quelques années plus tard. D’après lui, « l’état de stress se manifeste par un ensemble de réactions de l’organisme à l’action non spécifique d’agents stresseurs physiques, chimiques et/ou biologiques »[9].

D’après l’OMS, « le stress au travail influe négativement sur la santé psychologique et physique des individus »[10]. En effet, le stress est considéré comme étant une des causes de l’épuisement professionnel également appelé burn-out.

La « notion de stress au travail semble être plus fréquente aux professions engagés dans une relation d’aide »[11] telles que les infirmiers, médecins ou encore les thérapeutes, enseignants …

Selon Brigitte MADJOUL, cadre de santé et infirmière de bloc opératoire, « la surcharge de travail et le manque de reconnaissances sont des facteurs influençant sur le stress des professionnels »[12]. Elle explique également que « le stress peut devenir un danger pour tout professionnel, sa chronicité peut entraîner des problèmes de santé. Ainsi le stress fait partie des risques psychosociologiques » de notre travail.

Ce qui rejoint les notions précédemment évoquées.

Afin de supporter un stress important, un certain nombre de soignants mettent en place, inconsciemment, des mécanismes d’adaptation aussi appelés mécanismes de défense.

Les mécanismes de défense du soignant

Selon le DSM IV, les mécanismes de défense sont des « processus psychologiques automatiques qui protègent l’individu de l’anxiété ou de la perception de dangers ou de facteurs de stress internes ou externes »[14].

Une autre définition est proposée par Holmes, psychiatre, en 1994, « les mécanismes de défense constituent des stratégies par lesquelles les personnes réduisent ou évitent des états négatifs comme le conflit, la frustration, l’anxiété et le stress »

Les mécanismes de défense ou d’adaptation visent donc à réduire l’angoisse, de manière inconsciente et involontaire.

Selon Martine RUSZNIEWSKI, psychanalyste spécialisée pour les soignants, ceux-ci « adaptent fréquemment des mécanismes de défense, de l’ordre de la fuite mais aussi plus massifs ou plus subtils, leur permettant d’atténuer l’impact de la souffrance dans la relation avec le malade. Ces comportements de fuite sont d’autant plus exacerbés en situation de crise aiguë ou d’appréhension extrême »[16].

En effet, les mécanismes de défense permettent aux soignants de se protéger psychologiquement dans certaines situations délicates, telles que les situations de stress, de violence ou de désarroi.

Dans l’ouvrage de Pascal PRAYEZ, psychologue clinicien, Martine RUSZNIEWSKI décrit dix mécanismes de défense du soignant :

  • « Le mensonge : dire autre chose que la vérité (face aux questions et aux problèmes de la réalité)
  • La fuite en avant : tout dire, sans reprise, sans accompagnement
  • La fausse réassurance : entretenir le patient dans un espoir artificiel
  • La rationalisation : rester dans un discours technique, hermétique qui isole le patient
  • L’évitement : mettre à distance spatiale ou à distance relationnelle
  • La généralisation : travailler dans la routine, le soin n’étant plus individualisé
  • L’esquive : parler avec le patient toujours d’autre chose que sa souffrance
  • La dérision : ironiser par rapport à ce que dit le malade, par rapport à la situation
  • La banalisation : faire preuve d’indifférence, de désintérêt face au patient
  • L’identification projective : prêter au patient nos émotions, notre compréhension de la situation, tel un écran qui nous évite de les interroger pour nous-mêmes »[17]

Le nombre de mécanismes de défense varie selon les auteurs. Ceux cités précédemment sont spécifiques aux soignants, et ils les utilisent, de manière générale, face à des patients notamment ceux dits « à risque ».

La notion de patient est donc importante dans la compréhension des mécanismes de défense de la part des soignants, c’est pourquoi dans la partie suivante je développe mon concept, mon idée, ma représentation du patient à risque aux urgences.

[1] Le soignant, [en ligne], [consulté le 28/12/2015], Disponible sur : http://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/soignant_soignante/73228

[2] Amiec recherche, Dictionnaire des soins infirmiers et profession infirmiers, 3e édition, 2005, Edition Masson p256

[3] SEDI, Profession Infirmier, Recueil des principaux textes, 2010, p196

[5] CURCHOD Claude, Relations soignants-soignés, prévenir et dépasser les conflits, 2009, Edition Masson, p26

[6] MERCADIER Catherine, Le travail émotionnel des soignants à l’hôpital, 2008, Edition Seli Arslam, p192

[7] CURCHOD Claude, Relations soignants-soignés, prévenir et dépasser les conflits, 2009, Edition Masson, p28

[8] RISPAIL Dominique, Mieux se connaître pour mieux soigner, une approche du développement personnel en soins infirmiers, Août 2003, Edition Masson, p27

[9] CHAKROUN W.O et al, Evaluation du stress chez le personnel des  urgences, Annales française d’anesthésie et de réanimation, 2013, volume 32, N°9, p 566

[10] OMS, Organisation du travail et du stress, préface

[11] CHAKROUN W.O et al, Evaluation du stress chez le personnel des  urgences, Annales française d’anesthésie et de réanimation, 2013, volume 32, N°9, p568

[12] MADJOUL B, Stress et communication au bloc opératoire, Interbloc, Septembre 2013, n°3, p

[14] IONESCU Serban et al, Les mécanismes de défense, 2012, Domont, Edition Armand Colin, p25

[16] Les mécanismes de défense, [en ligne], [consulté le 05/01/2016], Disponible sur : http://www.pediadol.org/IMG/pdf/U2011_ruszniewski.pdf

[17] PRAYEZ Pascal, Distance professionnelle et qualité du soin, 2009, Pays-Bas, Edition Lamarre, p136

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